SRDEII, budget 2017 : une nouvelle carte de l’ESS se dessine

La plupart des régions ont adopté leur Schéma régional de développement économique d’innovation et d’internationalisation (SRDEII). Quelques-unes ont déjà voté leur budget pour 2017. L’ESS y trouve sa place, poussée en avant par les obligations légales qui s’imposent aux exécutifs régionaux et à la diplomatie des acteurs.

On commence à y voir plus clair… Autant l’année 2016 a été une année de transition, autant 2017 s’annonce, pour l’ESS comme une année de concrétisation sur les territoires. Concrétisation des efforts de diplomatie et de pédagogie des réseaux et notamment des Cress au moment où se travaillaient les fameux schémas régionaux de développement économique d’innovation et d’internationalisation (SRDEII). De fait, le brouillard qui régnait en raison du double mouvement de la réforme territoriale et de l’alternance à la tête des exécutifs régionaux s’est largement estompé.Toutes les Régions ont organisé une conférence régionale de l’ESS (instituée par la loi de 2014)  et la plupart (hormis Hauts-de France, Grand-Est, Occitanie et Bretagne) adopté leur SRDEII avant le 1er janvier 2017.

Période d’acculturation

Le paysage s’éclaircit, donc, et même si laconjonction entre Conférence régionale et SRDEII n’a pas toujours été évidente, elle a servi à structurer le dialogue entre les représentants de l’ESS et les nouveaux élus. De l’aveu de certains d’entre eux, la conférence régionale a été l’occasion d’une première acculturation à ce que représente l’ESS en termes d’activité économique, d’emploi et de potentiel de contribution au développement économique et social du territoire.  « Pour nous, nouvelle majorité, la conférence, qui s’est déroulée le 28 juin à Angers, a permis de mieux appréhender l’ESS sur le territoire », estimait Paul Jeanneteau, vice-président des Pays de la Loire, dans un article de la Gazette des Communes. L’analyse des volets ESS des SRDEII dors et déjà adoptés, confirme que l’alternance n’a pas coupé les territoires de l’ESS en deux selon une dichotomie partisane. Par exemple, la Région Normandie place « les entreprises de l’ESS au cœur des grandes transitions normandes ». Et deux dispositifs d’appui spécifiques à l’ESS ont été adoptés début février pour se substituer à ceux qui fonctionnaient antérieurement dans les deux régions normandes . Emergence ESS vise à soutenir les structure de l’ESS en général et Emergence ESS Coopérative, cible la création et reprise d’entreprises en Scop ou Scic. Dans la région des Pays de la Loire, présidée par Bruno Retailleau, le SRDEII reprend un plan en trois objectifs pour l’ESS qui va de son décloisonnement à sa valorisation, ce qui passe notamment par un soutien à ses représentants. Toutefois l’enveloppe budgétaire, votée en décembre est en nette diminution et la politique régionale cherchera désormais à substituer les prêts ou avances remboursables aux subventions. La ligne « économie pour l’ESS » diminue d’un tiers (un millions d’euros) ce qui influe sensiblement sur les financements de la Cress, mais aussi de l’Urscop ou des PTCE.

Ce resserrement budgétaire se ressent dans d’autres régions comme l’Ile de France dont la décision de fermer l’Atelier, centre de ressources de l’ESS laisse un vide sur le plan opérationnel, que la Cress Ile-de-France aura à combler. La chambre francilienne devra embauché et a vu sa dotation augmenter à 200 000 euros en 2017. La CRESS a par ailleurs récupéré (sur décision de la Dirrecte), la charge d’animer le DLA régional avec Ile-de-France Active. Mais cette dotation supplémentaire ne compensera pas le budget qui était alloué à l’Atelier depuis dix ans. Et d’autres têtes de réseaux régionales ne connaissent pas encore l’appui financier qu’elles obtiendront.

Politique d’assimilation

Un troisième cas est à souligné, celui de régions telles que PACA ou Auvergne Rhône-Alpes. En Auvergne Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez a bien déclaré son soutien à l’ESS lors de la conférence régionale de l’automne, mais le SRDEII souligne « un soutien dans un cadre profondément revu ». Celui-ci conduira à « intégrer les entreprises de l’ESS dans les outils et politiques de développement économique » tout en assurant que cela se fera « sans remettre en cause les valeurs de l’ESS ». On retrouve là le positionnement de la Région PACA dont le président, Christian Estrosi, avait orienté son programme économique et social sur un appui fort et direct aux entreprises. L’enjeu, pour les représentants de l’ESS sera bien sûr, d’assumer un tel parti pris tout en travaillant à la reconnaissance de la singularité de ses modèles d’entreprise ce qui nécessitera sûrement une adaptabilité des dispositifs de droit commun.

En attendant la suite…

En Bretagne et dans le Grand Est, il faudra encore attendre. Mais l’absence d’alternance politique en Bretagne et le fait que cette région s’était dotée d’une stratégie 2014-2020 réduit les incertitudes. Un nouveau plan d’action pour les trois ans à venir est toutefois en cours d’élaboration et devrait être rendu public fin avril. Quant à la Région Grand Est, elle votera son SRDEII fin avril. En Bourgogne Franche-Comté et en Corse, le SRDEII affiche son volontarisme en matière d’ESS. Dans la première région citée on retrouve la volonté de voir l’ESS se décloisonner afin de jouer le changement d’échelle comme l’indique le RTES qui fait le point sur ses membres et en Corse, l’ESS est associée au champ de la solidarité, de l’insertion et de l’emploi. Quand à l’Occitanie, elle a adopté son budget 2017 le 2 février dernier. L’ESS y apparaît dans le chapitre « économie de proximité ». Malgré cette place qui semble réduire le champ de l’ESS – dans une Région présidée par Carole Delga, ex-secrétaire d’Etat à l’ESS – on retrouve une politique qui attribue à l’ESS des modalités de soutien spécifiques, telles que le soutien à Réalis (Centre de ressources, pépinière d’entreprise…), le maintient des dispositifs existants, ainsi que l’appui aux organisations chargées de « l’animation et la coordination ».

A l’épreuve de l’alternance, l’ESS semble avoir passé un cap dans les politiques régionales. Malgré les évolutions, différences de modèles et réductions budgétaires, les représentants de l’ESS sont aujourd’hui des interlocuteurs qu’on ne peut ignorer dans les conseil régionaux. Un acquis très important alors que ce sont ces Régions qui tiennent le chef-de-filat des politiques économiques territoriales.

Source : Chorum – Fil CIDES n°149